L'intelligence artificielle: inventeur? auteur? - Ouest Valorisation

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L’intelligence artificielle: inventeur? auteur?

LE STATUT DE L’INTELLIGENCE ARTIFICIELLE EN TANT QU’INVENTEUR OU AUTEUR

L’intelligence artificielle (IA) désigne un ensemble de techniques qui permet d’accomplir des tâches ou de résoudre des problèmes qui relèvent normalement de l’humain. La mise en œuvre de ces techniques se traduit par la création de programmes informatiques   en quelque sorte capables de simuler l’intelligence humaine grâce à l’apprentissage automatique.
A partir de données caractérisées, le programme informatique va évoluer et générer des modèles permettant au programme de prendre ensuite des décisions de manière autonome, sans intervention de l’humain.

En théorie, l’IA pourrait donc être en mesure de créer une œuvre originale en s’appuyant sur des données, puisque cette œuvre serait le résultat d’une démarche semblable à celle de l’humain, à savoir faire des choix. L’IA pourrait également intervenir dans un processus d’invention.

En pratique, cela soulève un questionnement juridique quant au statut de l’IA au regard du droit de la propriété intellectuelle :

  • Un programme d’IA peut-il être désigné en tant qu’inventeur dans une demande de brevet ?
  • Un programme d’IA peut-il être reconnu comme auteur d’une œuvre relevant de la protection par le droit d’auteur ?

Nous allons tenter de vous apporter des éléments de contexte pour arbitrer :

L’intelligence artificielle : un Inventeur ?
Une création générée par un programme d’IA est-elle brevetable ?

  • En droit français, droit européen
    La règlementation européenne (articles 60, 62 et 81 de la Convention sur le brevet européen (CBE) et règle 19 du règlement d’exécution) impose la désignation de l’inventeur dans toute demande de brevet. Les noms de famille, prénoms et adresse exacte de l’inventeur doivent être renseignés.
    A priori l’inventeur ne peut donc qu’être une personne physique.
    L’Office européen des brevets a confirmé cette position dans une décision du 27 janvier 2020 avec le rejet de deux demandes de brevet désignant un programme d’IA intitulé DABUS en tant qu’inventeur. Selon l’Office européen des brevets, le nom du système ne satisfait pas à l’exigence d’identification de l’inventeur (règle 19 du règlement d’exécution de la CBE).
    Mais surtout, un programme d’IA n’ayant pas de personnalité juridique, ne peut être désigné Inventeur.
    Si un programme d’IA ne peut être reconnu inventeur, cela ne signifie pas qu’une invention générée par une IA n’est pas brevetable. Le critère fondamental est celui de l’activité inventive : il faudra démontrer que cette activité inventive repose principalement sur la contribution de l’humain.
  • En droit américain
    Aucun questionnement : la législation américaine prévoit qu’un inventeur est nécessairement un individu.
    Quant à la brevetabilité d’une invention obtenue par une IA, la position américaine est la même qu’en Europe : si l’invention concernée répond aux critères de brevetabilité alors un brevet pourra être délivré.

L’intelligence artificielle : un Auteur ?
Une création générée par un programme d’IA est-elle éligible à la protection par le droit d’auteur?

  • En droit français
    Une œuvre peut être protégée par le droit d’auteur « à condition qu’apparaisse l’originalité voulue par l’auteur » (CA Paris 03/05/2006), qu’elle témoigne de l’empreinte de la personnalité de l’auteur. L’humain doit avoir un rôle actif dans le processus de création d’une œuvre
    Malgré cette position conforme au droit actuel, la question de la valorisation des créations artificielles est à considérer pour préserver les intérêts des différents acteurs et essayer de maintenir l’incitation économique dans ce domaine.
    En effet, trois catégories d’acteurs doivent voir leurs intérêts protégés :
    – Le ou les auteur(s) des œuvres initiales telle que la base d’apprentissage et la « source d’inspiration » du programme d’IA ;
    – La personne ou l’entité qui apporte le programme d’IA ;
    – La personne ou l’entité qui met les créations à disposition du public.
    Le droit d’auteur étant insuffisant pour protéger tous les intérêts de ces acteurs, un encadrement contractuel du processus de création entre ces acteurs est alors indispensable pour déterminer les apports et les droits de chacun dans et sur l’œuvre créée artificiellement.
  • En droit américain
    Le Copyright Act (Titre 17, chapitre 1) prévoit qu’une œuvre doit nécessairement être créée par un être humain pour bénéficier de la protection par copyright, l’équivalent de notre droit d’auteur.
  • En droit chinois
    La jurisprudence est fluctuante : Une décision de décembre 2019 du Tribunal de Shenzen a reconnu qu’un rapport généré par un programme d’IA pouvait bénéficier d’une protection par copyright car la structure du rapport était correcte, logique et avait une certaine originalité. A l’inverse, dans une décision de janvier 2020, la IP Court de Pékin statue que « l’originalité ne constituait pas une condition suffisante pour une œuvre d’écriture qui en vertu de la loi actuelle doit être créée par une personne physique »
    Enfin, pour toute invention ou œuvre originale générée par un programme d’IA, c’est le propriétaire du programme d’IA, personne physique ou morale, qui est titulaire des droits d’exploitation découlant du titre de brevet protégeant l’invention ou attachés à la création considérée.

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