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L’ACCES AUX DOCUMENTS ADMINISTRATIFS ET LA REUTILISATION DES INFORMATIONS PUBLIQUES

Dans un monde où la donnée et le partage de données en particulier sont un enjeu clé, la France a initié un mouvement d’ouverture des données publiques, qui a donné lieu à la création, en 2011, de la mission « Etalab » puis à l’adoption de plusieurs lois dont celle n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 dite pour une « République Numérique », qui a consacré le principe de l’open data par défaut.

Ainsi, un nombre conséquent de données publiques sont déjà mises à disposition sur la plateforme data.gouv.fr (plus de 45 000 jeux de données pour près de 4 000 organisations en avril 2023).

Le législateur a donc souhaité assurer une large mise à disposition des données publiques, en accès libre, gratuite et sous un format facilement réutilisable, dont nous vous détaillons les conditions ci-dessous.

 

LE DROIT D’ACCES

Le principe

C’est le Code des relations entre le public et l’administration (CRPA) qui organise l’accès aux documents publics et leur réutilisation.

L’article L311-1 du CRPA prévoit ainsi que les administrations sont tenues de publier en ligne ou de communiquer les documents administratifs qu’elles détiennent aux personnes qui en font la demande.

 Quels documents et quelles informations sont concernées ?

  • Les documents administratifs(article L300-2 du CRPA et article L311-2) : tous les documents produits et reçus dans le cadre d’une mission de service public, quels que soient leur forme ou support, et achevés. Par exemple : dossiers, rapports, études, statistiques, prévisions, codes sources.
  • Les informations et données publiques: les informations et données contenues dans les documents administratifs listés ci-dessus. Par exemple : données géographiques (références cadastrales), financières (subventions) ou environnementales (émissions, ventes de produits).

Quelles administrations sont concernées ?

  • l’Etat
  • les collectivités territoriales
  • les personnes de droit public ou privé chargés d’une mission de service public

Les modalités du droit à communication

Le principe posé par le législateur est double :

  1. une publication en ligne, ou
  2. une communication sur demande

En particulier, l’article L312-1-1 du CRPA prévoit une obligation de publication en ligne pour certains documents administratifs, dont notamment :

  • les bases de données, mises à jour régulièrement, qu’elles produisent ou reçoivent, et qui ne font pas l’objet d’une diffusion publique par ailleurs,
  • les données, mises à jour régulièrement, dont la publication présente un intérêt économique, social, sanitaire ou environnemental.

Cette obligation ne s’applique cependant pas aux collectivités territoriales de moins de 3500 habitants, ou personnes morales ayant moins de 50 salariés.

Nous ne détaillons pas ici les modalités de la communication sur demande, celle-ci visant plus précisément les demandes d’accès à des documents administratifs concernant un individu donné.

Par ailleurs, le site data.gouv.fr nous indique que ces documents administratifs, informations publiques et données doivent être publiés dans un format :

  • ouvert
  • aisément réutilisable
  • exploitable par un système de traitement automatisé

Les limites à la publication ou communication de données publiques

Certains documents ne peuvent pas être communiqués ou ne peuvent l’être qu’à la personne concernée ou qu’après avoir fait l’objet d’un traitement visant à retirer certaines mentions.

Cette limitation vise par exemple :

  • les documents dont la consultation pourrait porter atteinte à la défense nationale, à la sûreté de l’Etat ou à la sécurité publique (article L311-5 du CRPA)
  • les documents qui porteraient atteinte à la vie privée, au secret médical ou au secret des affaires (article L311-6 du CRPA)

De façon plus large, les documents ou données comportant des données à caractère personnel doivent être traités afin de rendre impossible l’identification des personnes concernées avant de pouvoir être rendus publics (article L312-1-2 du CRPA).

 

LA REUTILISATION

Etendue du droit de réutilisation

Le principe : les informations publiques communiquées ou publiées peuvent être utilisées

  • par toute personne, publique ou privée, physique ou morale, qui le souhaite,
  • à d’autres fins que celles de la mission de service public pour les besoins de laquelle les documents ont été produits et reçus (article L321-1 du CRPA).

Par ailleurs, la mise à dispositions de certaines informations publiques dites « de référence » constitue même une mission de service public, article L321-4 du CRPA. Il s’agit par exemple du plan cadastral informatisé, du registre parcellaire graphique ou du répertoire opérationnel des métiers et des emplois – https://www.data.gouv.fr/fr/pages/spd/reference/

Les conditions de réutilisation

L’article L322-1 du CRPA prévoit que la réutilisation des données publiques doit respecter les conditions suivantes :

  • Les données ne doivent pas être altérées
  • Le sens des données ne doit pas être dénaturé
  • Les sources et la date de dernière mise à jour des données doit être mentionnée

De plus, l’article L324-1 du CRPA acte le principe de la gratuité de la réutilisation d’informations publiques, tout en y prévoyant des possibilités d’y déroger, détaillées plus bas.

Enfin, l’article L323-1 du CRPA prévoit l’établissement d’une licence pour la réutilisation des informations publiques. On distingue deux cas :

  • Lorsque la mise à disposition des données est gratuite : une licence n’est pas nécessaire, mais elle est conseillée
  • Lorsque la mise à disposition fait l’objet d’une redevance : l’établissement d’une licence est alors obligatoire

Conditions de la mise en place d’une redevance

Comme indiqué plus haut, par principe, la réutilisation de données publiques est normalement gratuite. Elle peut cependant être payante dans deux cas :

  1. Les administrations devant couvrir par des recettes propres une part substantielle des coûts liés à leurs missions de service public peuvent mettre en place une redevance (article L324-1 du CRPA).

Par exemple, les bases de données de Météo-France ou de l’Institut National de l’information géographique et forestière (IGN) sont susceptibles d’être soumises au paiement d’une redevance.

Il nous semble que c’est cette première exception qui permet aux établissements de recherche que nous accompagnons d’octroyer des licences payantes.

  1. Lorsque la réutilisation porte sur des informations issues de la numérisation de fonds ou de collections par des bibliothèques, musées ou archives, une redevance peut être mise en place. à Elle ne peut cependant pas dépasser le montant des coûts de la collecte, production, conservation des données.

Les modalités de fixation de ces redevances sont encadrées. Dans tous les cas, les montants doivent être fixés selon des critères objectifs, transparents, vérifiables et non discriminatoires (article L324-3 du CRPA).

Conditions des licences d’utilisation

Les licences doivent permettre de fixer les conditions de la réutilisation des informations publiques. L’article L323-2 exige qu’elles n’apportent de restriction que :

  • Pour des motifs d’intérêt général
  • De façon proportionnée

 

Ces licences, qui doivent être des licences types, par voie électronique, peuvent être choisies parmi une liste fixée par décret. Ainsi, comme prévu en article D323-2-1 :

Pour les informations publiques, l’administration peut choisir :

 

Pour les logiciels, il peut s’agir :

  • De licences dites permissives, par exemple Apache ou CeCILL-B
  • Ou de licences avec obligation de réciprocité, par exemple GNU, Mozilla Public License ou CeCILL

Toute réutilisation doit donc respecter les termes de la licence choisie par l’administration.

Droit d’exclusivité

Par principe, la réutilisation de données publiques ne peut pas faire l’objet d’un droit d’exclusivité accordé à un tiers par une administration ou un établissement. Cependant, les articles L325-1 et suivants prévoient qu’il est possible de déroger à ce principe :

  • Si le droit d’exclusivité est nécessaire à l’exercice d’une mission de service public
  • Ce droit doit être limité dans le temps à savoir dix ans et le bien fondé du droit d’exclusivité doit être réexaminée tous les trois ans.

Il nous semble que c’est cette dérogation au principe qui permet aux établissements que nous accompagnons et à notre SATT de mener des projets de valorisation exclusifs avec des acteurs socio-économiques. La mission de service public à assurer ici étant la valorisation des résultats de la recherche, mission statutaire des établissements.

 

FOCUS PROPRIETE INTELLECTUELLE

Le 24 septembre 2023, un nouveau règlement européen datant du 30 mai 2022 a été adopté : le Data Governance Act ou Règlement sur la Gouvernance des Données, dit DGA/RGD. Celui-ci vise notamment à mettre en place un cadre harmonisé à l’échelle européenne pour la réutilisation de données protégées détenues par le secteur public. Comme pour le règlement dit RGPD sur les données personnelles, il est d’applicabilité directe en droit français.

Ce règlement comporte un nombre important de points communs avec la Loi pour une République Numérique. Ainsi, le texte européen s’appuie sur les principes FAIR (Findable, Accessible, Interoperable, Reusable / Facile à trouver, Accessible, Interopérable, Réutilisable), en cohérence avec les conditions de publication vues ci-dessus.

Ce règlement vient également appuyer ce que prévoyait déjà la Loi pour une République Numérique : bien que toute publication ou communication d’informations publiques doive respecter les droits des auteurs (article L311-4 CRPA), une administration ne peut se prévaloir de ses droits de propriété intellectuelle pour empêcher la réutilisation du contenu de ses bases de données.

Il existe cependant deux exceptions dans le CRPA actuel (article L321-3 CRPA) :

  • les bases de données produites ou reçues par des administrations dans le cadre d’une mission de service public à caractère industriel ou commercial soumise à concurrence.
  • les données qui ne seraient pas détenues à 100% par un organisme public, ex. données obtenues dans le cadre d’une CIFRE, en copropriété avec un industriel.

Le RGD semble par ailleurs confirmer la loi de 2016 à savoir que les établissements de recherche sont concernés et doivent appliquer les principes de publication et de réutilisation de leurs données sous réserve des éventuelles exceptions que nous avons indiqué précédemment concernant l’application de redevance et l’octroi d’une exclusivité.

Ces exceptions devraient pouvoir se maintenir compte tenu que le RGD indique dans son article 3 du chapitre II que l’article 3 est sans préjudice :

  • du droit de l’Union, du droit national et des accords internationaux auxquels l’Union ou les États membres sont parties en ce qui concerne la protection des catégories de données visées dans le RGD;
  • du droit de l’Union et du droit national en matière d’accès aux documents.

Toutefois, ce règlement n’étant entré en vigueur qu’en septembre 2023, certains éléments du CRPA seront peut-être mis à jour pour aligner les deux textes et/ou préciser le RGD.

En particulier comment se concilieront : le droit d’exclusivité sur des données des articles L325-1 et suivants du CRPA qui peut être accordé s’il cela est nécessaire avec des mission de service publics prévu pour un durée de 10 ans et celui de 12 mois prévu par le RGD dans la mesure nécessaire à la fourniture d’un service ou d’un produit d’intérêt général (article 4 point 2 et 4).

 

Pour aller plus loin :

https://www.etalab.gouv.fr/

https://www.data.gouv.fr/fr/

https://digital-strategy.ec.europa.eu/fr/policies/data-governance-act-explained

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